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Comment faire un apport en nature ?

08-11-2021
3 minutes

L’apport en nature, au même titre que l’apport en numéraire ou en industrie, peut être réalisé dès la constitution d’une société ou à l’occasion d’une augmentation de son capital social. Il consiste à transférer un bien du patrimoine de l’associé / actionnaire vers le patrimoine de la société. Ce type d’apport nécessite de respecter des procédures précises, avec, selon les cas, une évaluation financière par un commissaire aux apports.

Qu’est-ce qu’un apport en nature ? 

La création d’une société est marquée par la constitution de son capital social. Les associés / actionnaires y apportent généralement une somme d’argent (définition d’un apport en numéraire) mais peuvent également lui transférer un bien dont la propriété et/ou l’usage reviendront à la société. C’est la définition d’un apport en nature. Si l’associé apporte un savoir-faire particulier ou son réseau, on parlera d’apport en industrie

Dans le cadre d’un apport en nature, le bien peut être : 

  • Un élément corporel ou matériel (c’est-à-dire palpable), comme un bien meuble (une machine, de la marchandise, etc.) ou un bien immeuble (un appartement, une maison, etc.) 

  • Un élément incorporel ou immatériel (qu’on ne peut pas toucher) comme des actions ou titres obligataires, de la clientèle, un droit au bail ou encore un brevet.  

Il est possible de faire un apport en nature à la constitution de la société, mais aussi lors d’une augmentation du capital pendant la vie de la société, qu’il s’agisse d’un associé / actionnaire fondateur ou d’un investisseur extérieur.  

Exemple

Prenons l’exemple de Louise, heureuse propriétaire d’un salon de thé. Valentin aimerait s'associer avec elle, mais n’a pas envie d’investir de l’argent. Il préfèrerait apporter les 10 services à thé d'exception ainsi qu’un petit studio attenant au salon dont il a hérité. 

Les services à thé comme le local sont des apports en nature

En contrepartie, l’apporteur reçoit des titres sociaux, sous forme de parts sociales ou actions (selon la forme juridique de l’entreprise). Le nombre de titres est proportionnel au montant de l’apport. 

Pour rappel, participer au capital social d’une société confère des droits spécifiques : 

  • un droit à l’information 

  • un pouvoir décisionnel par le vote à l’assemblée générale des associés / actionnaires  

  • un droit de percevoir des dividendes 

Ces droits sont eux aussi proportionnels au nombre de titres détenus. 

Bon à savoir

En EURL, SARL, SASU et SAS, la responsabilité des associés est limitée au montant de leurs apports au capital. Concrètement, cela signifie qu’en cas de dettes, l’associé peut perdre uniquement les apports qu’il a effectués. Ses biens personnels ne seront pas saisis (sauf cas particulier). À l’inverse, la responsabilité des associés est illimitée dans les SNC et les sociétés civiles. 

 

Qui peut réaliser un apport en nature ? 

Pour être apporteur en nature, vous devez remplir 3 conditions cumulatives :  

  • Vous êtes une personne physique (un individu) ou morale (une société)  

  • Vous pouvez prouver que vous êtes le propriétaire du bien 

  • Vous êtes capable juridiquement : vous n’êtes donc pas un mineur non émancipé ou un majeur placé sous tutelle ou curatelle (sauf accord du juge des tutelles / curatelles) 

Pour aller plus loin : Personne physique et personne morale, quelles différences ? 

 

Quelle est la responsabilité de l’apporteur en nature ? 

L’apporteur en nature doit garantir la société contre 2 risques :  

  • L’éviction : la société doit pouvoir utiliser le bien en toute tranquillité et ne pas craindre d’en perdre l’usage. Cela peut arriver par exemple si l’associé se fait expulser d’un immeuble objet de l’apport.  

  • Les vices cachés : le bien ne doit pas présenter de défaut qui le rendrait inutilisable pour l’usage auquel il est destiné.  

Si l’une ou l’autre de ces garanties n’est pas respectée, l’associé / actionnaire apporteur est seul responsable et peut être amené à dédommager la société. 

 

Comment faire un apport en nature ? 

Vous êtes libre de décider des modalités de votre apport en nature :  

  • L’apport en propriété est le plus radical : le bien que vous apportez est transféré en pleine propriété, par définition il passe de votre patrimoine personnel au patrimoine de la société. Notez bien qu'en cas de dissolution de la société, la société propriétaire du bien peut être obligée de le vendre pour rembourser ses dettes auprès des créanciers. Dans le cas contraire, vous pourrez le récupérer.  

Bon à savoir

Un apport en pleine propriété d’un bien immeuble nécessite obligatoirement l’accord de votre époux ou épouse si vous êtes marié sous le régime de la communauté. Si l’un deux l’apporte sans l’accord de l’autre, l’apport sera considéré comme n’ayant jamais eu lieu. Puisque le bien est commun aux deux époux, votre conjoint peut également revendiquer la qualité d’associé.  

 

  • L’apport en usufruit vous permet de rester propriétaire du bien tout en accordant à la société l'usage du bien et la perception des revenus de votre bien pour une durée limitée. Celle-ci ne peut pas excéder 30 ans. Ensuite l’usage et les revenus du bien vous reviennent 

  • L’apport en nue-propriété accorde la propriété du bien à la société, mais vous continuez d’en jouir et de percevoir ses revenus, comme les loyers d’un immeuble 

  • L’apport en jouissance réduit ce champ puisque la société peut utiliser le bien pendant une durée déterminée, mais ne peut en disposer ou percevoir les revenus 

 

L’apporteur doit obligatoirement s’engager par écrit selon le moment de l’apport : 

  • S’il intervient à la constitution de la société, il devra être notifié dans les statuts ou dans un acte distinct (contrat d’apport). Dans ce dernier cas, l’acte devra être annexé aux statuts constitutifs. 

  • S’il intervient en cours de vie de la société, l’apporteur devra rédiger un contrat d’apport. 

La propriété du bien est transférée : 

  • À la date d’immatriculation de la société au Registre du commerce et des sociétés (RCS) en cas de constitution de la société 

  • À la date de réalisation définitive de l’augmentation de capital, si la société existe déjà. 

Contrairement à l’apport en numéraire, l’apport en nature doit être entièrement libéré s’il intervient à la constitution de la société. Par définition, cela signifie que la propriété du bien revient intégralement à la société dès sa création. 

Information importante

Selon l’article 635 du Code général des Impôts, un apport en bien immobilier doit être enregistré après du service des impôts des entreprises (SIE) du lieu d’établissement du siège social de l’entreprise. Il doit ensuite être publié au service de publicité foncière du lieu d’implantation de l’immeuble. 

 

Comment évaluer l’apport en nature ? 

L’importance d’une évaluation juste 

L’évaluation de la valeur de ce bien est une étape essentielle, car cet apport aura un impact sur le montant du capital social ainsi que sur le nombre d’actions ou parts attribuées à l’apporteur. 

Si l’apport en nature se voit attribuer une valeur supérieure à sa valeur réelle : 

  • Les tiers (investisseurs, créanciers, etc.) auront une image faussée de la « santé » de la société. 

  • L'apporteur détiendra plus de titres qu’il n’aurait dû en recevoir, ce qui entraîne une répartition inéquitable des titres entre les associés / actionnaires. 

  • Le capital social réel peut être insuffisant en cas de liquidation de la société : les associés seraient alors contraints de rembourser une somme supérieure à leur apport initial. 

En cas de sous-estimation, l’apporteur se verra attribuer moins de titres qu’il ne devrait en recevoir.

 

L'intervention d’un commissaire aux apports (CAA) 

Le commissaire aux apports est un commissaire aux comptes (CAC), dont la mission est d’évaluer de manière impartiale la valeur d’un bien.  

Le commissaire aux apports est choisi à l’unanimité par les associés ou actionnaires. Sans accord unanime, il est désigné par le président du tribunal de commerce, à la demande du représentant légal de la société. 

Recourir un commissaire aux apports peut être obligatoire ou facultatif selon les cas. Cela dépend de la forme juridique de votre société et du moment où cet apport a lieu. Son intervention reste recommandée dans tous les cas.

 

Les sociétés anonymes (SA) 

Le recours à un commissaire aux apports est obligatoire, que l’apport en nature intervienne à la constitution de la société ou durant sa vie sociale. 

Les SNC et les SCI 

L’intervention du CAA est toujours facultative, quel que soit le moment où l’apport en nature a lieu. La responsabilité des actionnaires est en effet illimitée dans ce type de sociétés. 

Les SARL et les SAS 

Les EURL et les SARL bénéficient d’un statut dérogatoire, que l’apport en nature soit réalisé à la constitution de la société ou en cours de vie sociale (augmentation de capital). 

Ainsi, les associés peuvent décider à l’unanimité de ne pas désigner de CAA si l’apport en nature répond à deux conditions cumulatives : 

  • La valeur de chacun des apports en nature est inférieure à 30 000 € 

  • La valeur totale des apports en nature n’excède pas la moitié du capital social  

Dans ce cas, ils assument solidairement et pendant 5 ans la valeur qu’ils auront donnée à l’apport en nature. 

La loi Sapin 2 du 9 décembre 2016 a étendu cette dispense aux SASU et aux SAS, mais uniquement pour les apports en nature effectués à la constitution de la société. Pour que la désignation d’un CAA soit facultative, l’apport en nature doit donc respecter les mêmes conditions que pour une SARL. En revanche, si l’apport en nature a lieu en cours de vie de la SASU ou de la SAS, la désignation d’un commissaire aux apports reste obligatoire

Bon à savoir

Lors de la constitution d’une EURL ou d’une SASU, l’associé unique personne physique peut également être dispensé de désigner un commissaire aux apports s’il exerçait une activité professionnelle en entreprise individuelle (EI ou EIRL) avant la constitution de la société et qu’il apporte à l’EURL ou la SASU des éléments qui figuraient dans le bilan du dernier exercice de son ancienne activité. 

 

Le CAA remet ensuite un rapport d’évaluation aux associés. Ces derniers procèdent à un vote (dont est exclu l’apporteur) afin de valider ou non l’estimation du CAA.  

Le rapport du CAA peut être contesté sur envoi d’une lettre recommandée par le dirigeant de la société. Si la mauvaise évaluation cause un tort à un associé ou à la société, la responsabilité du CAA peut être engagée. 

Notez enfin que les honoraires du commissaire aux apports varient selon le bien. Plus celui-ci sera difficile à évaluer, plus les honoraires seront élevés. Comptez entre 500 € et 3 000 € en moyenne. Ces tarifs sont toutefois limités par décret. Rendez-vous sur le site du greffe du tribunal de commerce dont vous dépendez pour connaître la grille tarifaire. 

Zoom sur les apports en nature immatériels 

Les apports en nature d’éléments immatériels font l’objet de formalités supplémentaires :  

  • Un apport de droits sociaux doit être notifié par acte authentique à la société. 

  • Un apport en brevet doit obligatoirement faire l’objet d’un écrit et doit être notifié à l’INPI pour qu’il soit mentionné au registre national des brevets. 

  • Un apport en marque ou licence de marque fait aussi l’objet d’un écrit et est déposé à l’INPI. 

  • L’apport d’un fonds de commerce répond à des formalités spécifiques, dont la déclaration à la commune et le dépôt au CFE en plus de la production d’un écrit.  

 

Vous savez désormais comment faire un apport en nature ! N’hésitez pas à contacter nos conseillers Simplitoo pour vous aider dans vos démarches de création de société ou d’entreprise. Nous sommes là pour répondre à vos questions et vous guider de A à Z ! 

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